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Togo- PIA : Un recadrage du projet s’impose

En ce mardi 10 octobre 2023, un sentiment d’attente fiévreuse imprégnait l’atmosphère au cœur de la Plateforme Industrielle d’Adétikopé (PIA). Tout était soigneusement orchestré pour accueillir Son Excellence Madame le Premier Ministre, Chef du Gouvernement, Victoire DOGBE, une figure de proue du leadership togolais.

L’occasion était la cérémonie tant attendue d’inauguration du bâtiment du Guichet Unique et le lancement de l’innovant projet “MADE IN TOGO” vers les États-Unis, une initiative porteuse de promesses. Pourtant, à la dernière minute, un couac imprévu s’est manifesté. L’absence de Mme le Premier Ministre, due à une urgence incontournable, a jeté une ombre sur l’événement. Un premier grain de sable dans les rouages bien huilés de la cérémonie. En outre, la Télévision Togolaise (TVT) n’a pas été au rendez-vous, éclipsant le projet du jour. L’autorité a-t-elle été au courant que le bâtiment, qui devait être le joyau de la soirée, n’a jamais fait l’objet d’une réception technique ou provisoire ? Une question se profile à l’horizon, implorant une réponse : pourquoi ? Cette interrogation subsiste. Cependant, malgré ces nuages inattendus, la cérémonie a eu lieu, avec la présence de certains ministres du gouvernement.

PIA, cet ambitieux projet, lancé il y a quelques mois, avait suscité de grands espoirs parmi les Togolais, méritant une attention particulière des autorités. L’engagement sans faille du gouvernement à industrialiser le pays et à réaliser ses ambitions de développement est indéniable. Néanmoins, à y regarder de plus près et selon les retours d’information, la Plateforme Industrielle d’Adétikopé (PIA) semble aujourd’hui prise entre les écueils de l’amateurisme social, l’inculture de ARISE, et l’indécision qui plane sur l’action du gouvernement togolais. Analyse…

Un projet ambitieux

La Plateforme Industrielle d’Adétikopé (PIA) est érigée sur une étendue de près de 400 hectares, stratégiquement située à Adetikopé, à seulement 15 kilomètres au nord de la capitale togolaise, Lomé. Cette infrastructure, fruit de la collaboration avec Arise IIP, s’inscrit dans le cadre d’un partenariat qui puise son inspiration du modèle gabonais Nkok. L’essence de la PIA réside dans sa vision novatrice de développement : “produire localement et se positionner sur les marchés internationaux”, une mission d’autant plus cruciale avec l’émergence de la Zone de Libre Échange Continentale Africaine (ZLECAF). Les promoteurs de la PIA ont tracé une feuille de route ambitieuse. Au cœur de cette initiative, on trouve la création de chaînes de production à haute valeur ajoutée, en particulier dans le secteur de l’industrie textile. Cela englobe l’approvisionnement en matières premières brutes, la transformation locale de ces matières, et l’exportation des produits finis. Le site héberge une zone industrielle, un parc capable d’accueillir 12 500 conteneurs, une plateforme destinée au stockage de coton et d’autres matières premières agricoles, un terminal pour les camions, ainsi qu’une zone de 200 000 mètres carrés dédiée à diverses activités logistiques. « Un élément clé de cette infrastructure est son usine de traitement des déchets, un commissariat de police, une caserne de pompiers, et un guichet administratif unique regroupant tous les services et agences nécessaires, facilitant ainsi les démarches pour les investisseurs et les opérateurs économiques. Les projections pour la PIA, telles que présentées par Gagan Gupta, le dirigeant d’Arise IIP, sont audacieuses. D’ici 2023, l’objectif est de mettre un terme à l’exportation de coton brut. Dans les années à venir, la plateforme ambitionne de produire des dizaines de millions d’unités de serviettes, de lits, et de vêtements grâce à une unité de textile domestique. Les exportations togolaises, selon les prévisions, devront croître de manière spectaculaire d’ici 2025, passant de 75 millions de dollars à environ un milliard de dollars. Cette croissance, une multiplication par 12 de la valeur en si peu de temps, constituerait une prouesse inédite sur le continent africain. La PIA ne se limite pas à un seul secteur, elle vise à dynamiser la production de soja, de bois, de marbre, et d’engins électriques. Cette initiative a mobilisé un investissement colossal de près de 130 milliards de francs CFA. Le projet est également orienté vers la création d’emplois. Plus de 35 000 emplois directs devraient être générés au cours des quatre prochaines années, mais la vision à long terme de la PIA va bien audelà, avec l’ambition de créer plusieurs millions d’emplois d’ici 2030. La Première Ministre togolaise, Victoire Dogbé, a souligné que la PIA représentait un “tournant décisif pour l’industrialisation du pays”, réaffirmant ainsi l’engagement du gouvernement togolais dans cette entreprise ambitieuse de développement économique et industriel.

Le Soja, une obsession …

La Plateforme Industrielle d’Adétikopé (PIA) avait des ambitions significatives pour le secteur du soja au Togo. L’usine Togo Soja, développée avec un investissement de 25 millions de dollars, visait à répondre à une demande régionale et mondiale en produits dérivés du soja. Elle était conçue pour transformer localement 200 000 tonnes de soja en huile, très prisée sur les marchés internationaux, et en tourteaux. Cette transformation devait également servir de fertilisants aux agriculteurs, contribuant ainsi à une chaîne de valeur complète du soja. Cependant, il est regrettable de constater que les responsables de la PIA se sont principalement concentrés sur l’exportation du soja, négligeant ainsi la transformation locale.

Des informations non confirmées ont fait état de conteneurs de soja abandonnés dans les ports de Lomé et de Cotonou, probablement en raison de négligence. Cette obsession pour l’exportation du soja a eu des répercussions négatives sur la production du coton. En effet, malgré sa reprise par Olam, le coton poursuit sa traversée du désert. La production de l’or blanc a enregistré une nouvelle baisse de 11 % lors de la campagne 2022-2023, après une chute d’environ 25 % la saison précédente. Selon la Fédération nationale des groupements de producteurs de coton du Togo (FNGPC), la production est passée de 52 528 tonnes à 46 549 tonnes cette année. Ces chiffres ont été annoncés lors de la présentation du bilan annuel par la FNGPC le 30 juin 2023 à Kara. Certains producteurs se sont tournés vers la culture du soja en raison de meilleures conditions de marché, de la demande croissante pour le soja et du soutien de la PIA via le Mécanisme incitatif de finance agricole fondé sur le partage de risques (MIFA). Afin de remédier aux problèmes constatés dans le secteur du soja au Togo, il est impératif que la Plateforme Industrielle d’Adétikopé (PIA) recentre ses efforts sur la transformation locale du soja. Cette approche doit être conforme aux ambitions initiales de la PIA, visant à créer des chaînes de valeur locales pour le soja, augmentant ainsi la valeur ajoutée et contribuant à l’industrialisation du pays.

Une composante essentielle de cette réorientation est la nécessité de placer des individus compétents et experts à la tête des usines de transformation du soja. L’improvisation doit céder la place à une gestion professionnelle, en mettant particulièrement l’accent sur la sécurité des travailleurs et la qualité des produits. Ce qui est davantage frustrant, c’est la cohorte « d’étudiants indiens » parachutés aux postes de responsabilité et sans expériences qui plombe le travail des autres. Pour éviter que la culture du soja ne concurrence de manière déstabilisante la production de coton, il est crucial de mettre en place une gestion appropriée des cultures alternatives. Les politiques agricoles devraient favoriser une diversification raisonnée des cultures, évitant ainsi des bouleversements indésirables dans le secteur. Le lancement ce 10 octobre de la production de l’huile à partir du Soja est sans doute une avancée importante. Sauf que certains doutent de la sincérité du projet.

La création d’une autorité spécialisée dans l’essor de l’agribusiness, composée d’experts, pourrait considérablement améliorer la supervision et la régulation du secteur. Cette autorité aurait un rôle central dans le choix des partenaires et l’orientation des activités de l’agribusiness. Un aspect fondamental du succès dans le secteur de l’agribusiness est la collaboration avec des compétences locales qui comprennent les besoins et les spécificités du contexte togolais. Cette approche favorisera un développement plus durable et équilibré du secteur. En résumé, pour atteindre les ambitions initiales de la PIA pour le secteur du soja au Togo, il est impératif de recentrer ses priorités sur la transformation locale, de s’entourer d’experts compétents, et de mettre en place des mécanismes de régulation appropriés. Ces actions sont essentielles pour garantir le succès des ambitions de la PIA dans le secteur du soja au Togo.

Le textile ou un avenir en brouillard

Tout d’abord, il convient de saluer le début de l’exportation de vêtements ‘Made in Togo’, un accomplissement à mettre au crédit d’ARISE, en collaboration avec le gouvernement togolais. Cela démontre un progrès significatif dans le secteur du textile au Togo et mérite d’être reconnu. Concernant la fabrication de vêtements sur place au Togo, une avancée notable a été réalisée. Cependant, il subsiste des doutes sérieux quant à l’origine des fils utilisés. Il est question de savoir si ces fils proviennent du coton togolais, comme promis par la Plateforme Industrielle d’Adétikopé (PIA). Il semble que le projet soit mal ficelé, et des ajustements rapides sont nécessaires pour rectifier cette situation. Le secteur du textile au Togo connaît un tournant significatif avec le lancement de l’exportation de vêtements ‘Made in Togo’ vers les États-Unis d’Amérique depuis la Plateforme Industrielle d’Adétikopé (PIA). Plus de 123 000 vêtements, commandés par la marque américaine ‘Children’s Place’, ont été expédiés dans des conteneurs vers les États-Unis. Cette avancée, survenue près de deux ans après la mise en service du parc textile au sein de la PIA, confirme les choix stratégiques du gouvernement visant à promouvoir le secteur industriel via la PIA, conformément à sa feuille de route prioritaire. Le lancement des exportations de vêtements témoigne de l’engagement du Togo à entreprendre des réformes audacieuses pour améliorer le climat des affaires et stimuler les investissements nationaux et étrangers en vue de diversifier l’économie. Cette démarche s’inscrit dans une collaboration étroite entre le secteur public et le secteur privé, visant à multiplier les investissements similaires à ceux réalisés par la PIA, comme l’a souligné la ministre de la promotion de l’investissement, Manuella Santos.

Néanmoins, il est impératif de développer davantage la filière coton, car c’est une priorité pour la viabilité des emplois créés. Il subsiste des interrogations sur l’origine des tissus utilisés dans la confection des vêtements exportés vers les États-Unis. Il est nécessaire de s’assurer que ces tissus proviennent du coton togolais, car actuellement, il n’y a pas de filage sur le site. La PIA était initialement destinée à assurer la transformation du coton, ce qui doit être rappelé pour atteindre ses ambitions dans ce domaine. Le Port sec : une effectivité en pointillé La Plateforme Industrielle d’Adétikopé (PIA) présente des ambitions considérables, notamment en tant que hub logistique régional, avec un port sec et un parc de stationnement pour les camions. Cependant, il est important de noter que certaines difficultés ont entravé la pleine réalisation de ces projets, notamment des problèmes liés à la délimitation du terrain entre MSC et PIA. La PIA dispose d’un port sec d’une capacité de 12 000 EVP, conçu pour désengorger le Port de Lomé. Cette infrastructure vise à positionner le Togo en tant que hub logistique régional pour les pays de l’Hinterland, en offrant des services compétitifs.

De plus, un nouveau site de stationnement pour les camions, avec une capacité de 487 places, a récemment été mis en service. Cela représente une extension du port sec existant et contribue à soulager la congestion du port de Lomé. Cependant, il est essentiel de reconnaître qu’il subsiste des défis importants, en particulier en ce qui concerne la délimitation du terrain entre MSC et PIA, ce qui a entravé le démarrage du port sec. Cette situation compromet la pleine utilisation de ces installations essentielles pour le développement logistique du Togo. La résolution de ces problèmes est cruciale pour attirer des investisseurs et garantir le bon fonctionnement de la PIA.

La nouvelle ministre en charge de ces questions logistiques doit prendre l’initiative de résoudre ces litiges et d’améliorer l’image du Togo en tant que destination logistique attrayante. Il est également important que toutes les parties prenantes, y compris MSC et LCT, collaborent sincèrement avec la PIA. La coopération est essentielle pour surmonter les obstacles actuels et assurer le succès de ces projets logistiques. – Le gouvernement togolais doit faire preuve de transparence dans la résolution de ces problèmes et communiquer clairement sur les enjeux. Cela permettra de rassurer les investisseurs et de favoriser un environnement propice aux activités logistiques. En somme, il est nécessaire de résoudre rapidement les défis liés à la délimitation du terrain du port sec et d’encourager la coopération entre les parties concernées pour garantir le succès des initiatives logistiques de la PIA.

Le gouvernement togolais doit vraiment reprendre le contrôle de cet ambitieux projet Les défis et les problèmes auxquels est confrontée la Plateforme Industrielle d’Adétikopé (PIA) requièrent des recommandations spécifiques pour assurer le succès de ses projets. Le gouvernement doit être transparent et communiquer clairement sur ses intentions et les problèmes en cours. La clarté est essentielle pour rassurer les investisseurs et favoriser un environnement propice aux activités logistiques. Il est souhaitable que l’exécutif togolais intervienne de manière proactive pour résoudre les problèmes existants. Cela peut inclure des démarches pour nommer au moins un Directeur Général Adjoint (DGA) togolais au sein de PIA. De plus, le gouvernement doit travailler en étroite collaboration avec les dirigeants d’Arise pour revoir les conditions de travail et les salaires des travailleurs togolais, afin d’assurer une plus grande équité. L’équipe de Victoire Dogbé doit accompagner le projet de la PIA en fournissant des consignes claires aux dirigeants d’Arise. Il ne devrait pas laisser place à l’improvisation et doit s’engager activement dans la supervision et la régulation des activités de la PIA. Il est impératif de donner à l’autorité ministérielle compétente le pouvoir de résoudre le problème de la délimitation du terrain du port sec de manière définitive. Cette action est essentielle pour permettre le bon fonctionnement de ces infrastructures.

Il est également crucial de remettre la gestion de l’agribusiness entre les mains de véritables experts qui comprennent les besoins et les spécificités du contexte togolais. Cela favorisera un développement plus durable et équilibré du secteur. Par ailleurs la filière coton doit être développée en priorité pour soutenir l’ensemble des métiers créés dans ce secteur. Cela implique d’assurer que les matières premières utilisées dans le textile proviennent du coton togolais, en ligne avec les ambitions initiales de la PIA. En résumé, le gouvernement doit jouer un rôle actif dans la résolution des problèmes actuels, fournir des directives claires aux partenaires impliqués, et veiller à ce que la PIA atteigne ses objectifs tout en contribuant au développement économique du Togo.

La Rédaction

Source : Le journal du Togo N° 137 du vendredi 20 octobre 2023

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Cliffhanger !!!
Cliffhanger !!!
October 23, 2023 6:38 pm

Excellente contribution journalistique !!;

Article bien pensé et instructif, qu’il ne s’agit pas de créer des structures mais aussi de les gérer correctement.

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