«…Quand moi je prends un pays voisin comme le Bénin, mais le travail que fait le président Patrice Talon au Bénin est un travail formidable. Il travaille pour son peuple, donc on ne peut que le féliciter…Moi je suis sincère; de toutes les façons , je dis toujours que si vous n´êtes pas sincère, les faits sont là. Je crois que le Bénin d´il y a quelques années et le Bénin d´aujourd´hui, ce n´est pas le même Bénin…» (Robert Dussey, ministre sortant des affaires étrangères du Togo)
Monsieur Robert Dussey, ministre togolais des affaires étrangères du gouvernement démissionnaire, par cette déclaration en faveur du bon travail qu‘effectuerait Monsieur Patrice Talon pour son pays, le Bénin, n´est-il pas entrain de reconnaître indirectement l´échec de la gouvernance de Faure Gnassingbé au Togo sur tous les plans?
En effet, en dehors des élucubrations éhontées sur un prétendu esprit panafricaniste de son mentor, en dehors des nombreuses violations des droits humains, de la corruption institutionnalisée, le tout couronné par une impunité totale, quel bilan positif peut présenter le pigeon voyageur Dussey depuis 2005, date de la prise du pouvoir par Faure Gnassingbé dans le sang? C´est pourquoi cette façon de parler en des termes élogieux du Bénin et surtout de son président Patrice Talon revient à parler du Togo qui, comparé au voisin de l´est, n´est que l´ombre de lui-même. Et Monsieur Robert Dussey , en sa qualité d´une des voix les plus écoutées par Faure Gnassingbé, a une très grande responsabilité dans ce qui se passe de politiquement, de socialement et d´humainement inacceptable sur la terre de nos aïeux depui plusieurs années. Et ces voix les plus écoutées autour du dictateur togolais, qu´elles soient masculines ou féminines, sont légion.
Faure Gnassingbé les écoute-t-il vraiment ou fait-il ce qu´il veut? Ces hommes et femmes, proches du pouvoir, sont-ils assez courageux, assez amoureux de leurs concitoyens, assez sensibles aux souffrances des Togolais, pour se faire respecter par le président de fait du Togo et faire passer leur point de vue pour une gouvernance plus humaine? Si vraiment ceux ou celles qui entourent Faure Gnassingbé avaient un brin de patriotisme et ne pensaient pas seulement à leurs intérêts personnels, les choses pourraient bouger dans un sens positif. Le cas togolais où les soi-disant barons autour du dictateur, se prennent pour de petits dieux dans leurs quartiers et dans leurs localités d´origine, montrent à suffisance que les gros diplômes universitaires ou l´expérience pour avoir travaillé pour des organisations internationales ne sont pas forcément une garantie pour qu´on soit un ministre ou un conseiller compétent, consciencieux, respecté et respectable autour du pouvoir, surtout dans une république bananière, comme le Togo , où il faudrait une certaine dose de dignité, de respect de soi et surtout d´amour pour son peuple. Car avant de se faire écouter pour que son point de vue soit respecté et pris en compte, il faudrait dégager une certaine respectabilité, une certaine aura de personnalité sérieuse et responsable. Et si des régimes de dictature, nocifs pour l´épanouissement de leurs peuples, font encore la loi, ici et là, sur le continent noir, c´est la plupart du temps dû à des entourages méchants, comme au Togo, encourageant le tribalisme et le népotisme.
Et notre pays le Togo, après un demi-siècle d´un régime d´exception, de père en fils, passe aujourd´hui pour l´un de ces mauvais exemples, sinon le plus mauvais exemple en Afrique, où le «dieu» Éyadéma d´abord, et ensuite son fils Faure Gnassingbé, entouré d´hommes et de femmes peu courageux, toujours prêts, sans aucun brin de dignité, à faire l´âne pour avoir le foin, ont eu toute la latitude pour transformer une république en monarchie, une armée républicaine en une milice tribale, sinon familiale. Et si certains nous disent que l´entourage n´y est pour rien dans la descente aux enfers du pays à cause de la mauvaise gouvernance, parce que de toutes les façons c´est Faure Gnassingbé qui déciderait de tout, tout seul et n´écouterait personne, alors tous ces ministres et autres conseillers, apparemment proches du centre du pouvoir, conscients du fait qu´ils ne joueraient qu´un rôle de faire-valoir, ne sont là que pour leurs avantages personnels. Certes, il n´est pas du tout facile de travailler sous un dictateur de chef d´état qui ne fait confiance à personne et qui veut tout contrôler. Il est aussi vrai que le potentat, aussi dictateur cruel soit-il, n´est rien et ne peut rien seul sans son entourage proche.
Dans un message-audio circulant depuis quelques jours sur la messagerie whatsapp, l´ancien ministre Ihou Watéba nous apprend comment il est difficile d´émettre un avis contraire en conseil des ministres, dans le but de faire améliorer la gouvernance, sans être traîté de paria par ses propres collègues ministres; et surtout sans provoquer le courroux du dictateur. La raison est que tout simplement le président est habitué aux flatteries, aux mensonges et n´est plus en mesure de tolérer un discours contraire.
Qu´est-ce qui se passerait si plusieurs ministres se concertent, prennent leur courage à deux mains, pour régulièrement regarder leur chef dans les yeux et lui dire en toute franchise, ce qui ne va pas, ce que les populations ressentent? La peur de ne plus bénéficier des faveurs du maître des lieux, le manque de courage et le fait que l´on soit focalisé sur ses intérêts personnels; voilà ce qui fait que des personnalités détenant de grands diplômes, ayant été bien notés sur le plan international pour leur compétence, ne sont plus rien dans l´entourage d´un dictateur comme Faure Gnassingbé du Togo.
Enfin pour parler de courage de personnalités autour du pouvoir politique dans l´histoire récente de notre pays, nous pouvons citer l´exemple d´Agbéyomé Kodjo et de Dahuku Péré, aujourd´hui disparus. En effet, Agbéyomé Kodjo, ministre et plus tard président de l´assemblée nationale, s´était brouillé avec le dictateur Gnassingbé Éyadéma en 2002, après avoir publié un brulôt « il est temps d’espérer », dans lequel il dénonçait la mauvaise gouvernance et faisait des propositions pour changer les choses. Il avait dû prendre le chemin de l´exil. Le sort de l´autre ancien président de l´assemblée nationale, Dahuku Péré, qui avait aussi exprimé son désaccord contre la manière dont le pays est dirigé, ne fut pas non plus des plus enviables. Agbéyomé Kodjo, surtout lui, aura prouvé qu´il est possible de remettre en question son soutien à un régime de dictature, de le dénoncer et de rechercher du mieux pour son peuple. Une leçon pour nos fidèles défenseurs d´une 5e république impopulaire et d´un panafricanisme intéressé.
Samari Tchadjobo
Allemagne