Le Secrétaire Général du Parti national panafricain (PNP), section Kpalimé, arrêté, détenu pendant plusieurs mois en prison puis relâché il y a quelques jours, est décédé hier jeudi au CHU Sylvanus Olympio. YAKOUBOU Abdoul-Moutawakilou était très malade en prison. Sa mort provoque la colère du Comité de libération des prisonniers politiques (CLP) qui, dans une déclaration, s’indigne.
DECLARATION
C’est avec colère et indignation que nous avons appris le décès au CHU-Sylvanus OLYMPIO, aux environs de 16H, de YAKOUBOU Abdoul-Moutawakilou, enseignant, Secrétaire général du PNP-Section Kpalimé.
Ayant pris connaissance de cette triste nouvelle, le Comité pour la libération de tous les prisonniers politiques du Togo tient d’abord à condamner et à dénoncer avec la plus grande vigueur l’arrestation, la détention arbitraire, les tortures et autres traitements cruels, inhumains et dégradants qui lui ont été infligés tout au long de sa détention et qui sont la principale cause de sa maladie et de son décès.
Tout en présentant ses sincères condoléances à la famille de YAKOUBOU Abdoul-Moutawakilou, le Comité exige que tous ceux qui, dans la chaîne de responsabilités, ont eu à ordonner et à exécuter son arrestation ainsi que son maintien en détention en toute illégalité, pour des raisons uniquement « politiques », soient recherchés, identifiés et poursuivis.
Arrêté le 25 janvier 2020, comme nombre de militants et sympathisants du PNP croupissant actuellement dans les geôles du régime de M. Faure Essozimna GNASSINGBE, YAKOUBOU Abdoul-Moutawakilou a été détenu au Camp GP d’Agoè Logopé.
Un camp où des citoyens innocents ont été sauvagement torturés et ont subi de tels traitements cruels, inhumains et dégradants qu’au moins cinq d’entre eux en sont morts, assassinés en détention, par un entêtement diabolique. Il s’agissait déjà de :
— 1. Mourane TAIROU, arrêté dans l’affaire « Tigre Révolution » à Soudou, mais originaire d’Agbandawdè, décédé sans avoir été jugé ni condamné le 6 octobre 2020, lendemain de son évacuation au service de réanimation du pavillon militaire du CHU Sylvanus Olympio ;
— 2. Alassani ISSAKA, arrêté le 26 janvier 2020 dans l’affaire « Tigre Révolution », décédé sans avoir été jugé ni condamné en octobre 2020 au Cabanon du CHU Sylvanus Olympio ;
— 3. Saïbou MOUSSA, arrêté 26 janvier 2020 à Lomé dans l’affaire « Tigre Révolution », décédé sans avoir été jugé ni condamné en octobre 2020 au Cabanon du CHU Sylvanus Olympio ;
— 4. Seybou ALILOU, arrêté le 26 janvier 2020 dans l’affaire « Tigre Révolution », décédé sans avoir été jugé ni condamné en octobre 2020 dans sa cellule à la Prison civile de Lomé ;
— 5. SOULEMANE Djalilou, arrêté dans l’affaire « Tigre Révolution », décédé sans avoir été jugé ni condamné en octobre 2020 au Cabanon du CHU Sylvanus Olympio.
Revenons à YAKOUBOU Abdoul-Moutawakilou pour dire qu’après avoir été détenu et torturé au Camp GP d’Agoè-Logopé, il a été déféré dans un premier temps à la Prison civile de Tsévié avant d’être transféré, le 16 août 2020, à la Prison civile de Lomé où, tombé gravement malade, il a été conduit en urgence, le 22 juin 2021 au Cabanon du CHU-Sylvanus OLYMPIO.
Son état de santé s’aggravant continuellement, il a introduit une demande de mise en liberté provisoire à travers son conseil.
Ce fut alors que, saisi de la gravité et de la détresse de sa situation, le Comité pour la libération de tous les prisonniers politiques du Togo s’est d’abord mobilisé sur son cas en faisant faire les analyses nécessaires pour avoir un diagnostic plus précis sur son état de santé. Ceci a permis d’identifier qu’il était atteint d’un lymphome non hodgkinien (LNH), une forme de cancer abdominal qui peut avoir une évolution fulgurante, affection survenant généralement comme conséquence d’un fort stress.
Face à ces résultats terrifiants, le Comité multiplia les interventions nécessaires auprès des autorités compétentes ayant pouvoir de décision sur son cas afin qu’il ne soit plus détenu dans les conditions exécrables qui sont celles du Cabanon du CHU-Sylvanus OLYMPIO où les prisonniers politiques sont détenus, menottés à leur lit d’hôpital ! Cela, afin qu’il puisse aller se faire soigner dans des conditions plus dignes hors du milieu carcéral.
Une intervention décisive fut faite par le Comité auprès de la CNDH où, prise de compassion pour sa situation, sa présidente, feu Mme Naka POLO, a fait le nécessaire auprès des autorités judiciaires pour qu’une suite favorable soit donnée à la demande de mise en liberté provisoire de YAKOUBOU Abdoul-Moutawakilou et elle lui a été accordée le vendredi 16 juillet 2021 par le juge en charge de son dossier. Le 19 juillet, bénéficiant de cette mise en liberté provisoire, il a été transféré du Cabanon à la Clinique médicale du même CHU-Sylvanus OLYMPIO.
Puis commença une terrible bataille contre la maladie où les fonds, heureusement mis à la disposition du Comité à travers la campagne de parrainage des prisonniers politiques lancée par nos compatriotes de la diaspora, a permis d’aider à prendre en charge les différents frais nécessités par sa situation.
Une amélioration était en vue et nous nous réjouissions tous que l’issue d’une guérison miraculeuse soit en perspective.
Mais, le mardi 24 août YAKOUBOU Abdoul-Moutawakilou était frappé d’une terrible hémorragie qui n’entendait pas cesser.
Tombé dans le coma dans la nuit du 24 au 25 août 2021, il a été reconduit d’urgence, hier 25 août, au CHU-Sylvanus OLYMPIO où il a rendu l’âme, ce lendemain, 26 aout 2021 aux alentours de 16H.
Face à cette véritable tragédie qui vient de survenir, nous ne pouvons que nous associer à la problématique soulevée dans un article publié par le journal Liberté qui, sous le titre : « Yakoubou Moutawakilou du PNP: une libération qui suscite plus d´interrogations qu´elle n´en résout », lui a consacré un dossier dans son N° 3433 du 27 juillet 2021 où est écrit ceci :
« Malade depuis plusieurs mois, mais ils avaient préféré que son état se détériore à son lieu de détention avant de se résoudre à le conduire à l´hôpital. Gravement malade, laissé à la charge de sa famille, sa détention et aujourd´hui sa libération provisoire, dit-on, posent le problème de ces détentions arbitraires, fantaisistes, à coloration tribale, qui renvoient plus à la formule de la loi du plus fort. Ces arrestations ou plutôt ces enlèvements sauvages de militants de partis politiques, qui ne reposent sur aucune raison valable, posent la question de la prise en charge des prisonniers malades, en détention et après leur libération. Ces prisonniers rendus malades pendant leur détention, et qu´on laisse parfois mourir, pose le problème de l´impunité avec laquelle les tortionnaires et leurs commanditaires continuent à détruire des vies d´innocents citoyens en ces tristes lieux. Pour Yakoubou Moutawakilou, qui est toujours hospitalisé et souffrant d´après les dernières nouvelles en notre possession, nous espérons que ce ne soit pas trop tard comme pour Taïrou Mourane, Moussa Saïbou, Issaka Alassani, Soulémane Djalilou Grand… arrêtés le 26 janvier 2020; tous sauvagement torturés au camp GINP d´Agoé-Logopé dans l´affaire sans tête ni queue dite «Tigre Révolution». Tous morts en détention sans jamais avoir été jugés et condamnés. Une liste malheureusement incomplète de prisonniers dont les familles ne recevront que les corps sans vie.
Ils sont encore très nombreux, ces citoyens et citoyennes togolais à végéter en prison sans savoir le sort qui les attend. (…)
Quel est donc ce régime qui parle de démocratie et d´élections, et en même temps engage une chasse à l´homme tous azimuts contre les vrais opposants à son système de gouvernement décrié par tous? Comme Yakoubou Moutawakilou, il y a encore beaucoup de citoyens et citoyennes togolais, comme nous venons de le démontrer, arbitrairement arrêtés et détenus dans des conditions inhumaines. Et ce qui saute aux yeux en parcourant la longue liste des incarcérés, c´est le caractère éthnico-tribal de l´acharnement du régime de Faure Gnassingbé contre certains Togolais. Plus de 99% des citoyens brutalement arrachés à la liberté sont, soit de Tchaoudjo, d´Assoli ou de Tchamba. Est-ce la bonne voie, selon ce régime d´un autre âge, pour arriver à la fameuse réconciliation dont on nous parle dans les discours officiels? Nous ne croyons pas. Pour terminer, nous voudrions joindre notre modeste voix à celle des associations de défense des droits de l´homme, et des leaders de la société civile engagés pour la même cause, pour demander la libération sans conditions de tous les détenus politiques, dont Kpatcha Gnassingbé et ses co-détenus. Et après leur libération que l´état togolais pense à leur dédommagement, ainsi qu´à celui des familles de tous ceux qui sont morts en détention. »
C’est pourquoi nous ne pouvons que réitérer ici, les revendications immédiates présentées dans notre « MÉMORANDUM POUR L’ARRÊT DE LA PRÉOCCUPANTE VAGUE RÉPRESSIVE EN COURS D’ACCÉLÉRATION AU TOGO » par lesquelles nous exigeons notamment :
« 1. Libération inconditionnelle et immédiate de tous les prisonniers politiques du Togo et réparation-dédommagement de ces citoyens injustement arrêtés, détenus, torturés ou morts en détention ;
- Réapparition en vie de tous les prisonniers politiques ;
- Mise en place d’une Commission internationale d’enquête indépendante pour faire toute la lumière sur les allégations de décès en détention sous la torture ou toute autre cause avec identification et arrestation des auteurs et commanditaires de ces actes criminels pour qu’ils en répondent devant la Justice, (…).
- Nos enquêtes et investigations ont mis à jour des allégations de tortures, traitements cruels, inhumains et dégradants sur des détenus politiques mettant en cause 18 agents qui, détenteurs d’autorité de la force publique, doivent être entendus pour en répondre ;
- Dissolution des unités coupables d’exactions à l’encontre des prisonniers politiques ;
- Constitution d’une Commission internationale d’enquête indépendante pour faire la lumière sur les dysfonctionnements au sein de la Justice togolaise avec suspension des magistrats que révèlera l’enquête comme auteurs ou coupables d’instrumentalisation de la justice aux fins de maintien illégal en détention et condamnation de citoyens innocents et leur mise à la disposition de la Justice pour qu’ils en répondent ;
- Arrêt de l’instrumentalisation de la Justice et dans ce cadre :
* Respect de l’indépendance de la magistrature ; (…)
* annulation de toutes les charges fantaisistes à l’encontre des activistes politiques et de la société civile ;
- Respect de toutes les libertés démocratiques garanties par la Constitution togolaise et les instruments internationaux ratifiés par l’Etat togolais (…) »
Parce que ces revendications sont plus que d’actualité après le décès de YAKOUBOU Abdoul-Moutawakilou, nous exigeons :
« Libération inconditionnelle et immédiate de tous les prisonniers politiques du Togo ! »
Lomé, le 28 août 2021
Si l’ appartenance politique est consideree comme la mort pour les citoyen donc
les autorites togolaises n’ ont rien compris et se comportent comme si nous sommes dans les annees 1970.
RIP!
.Et en même temps, une pensée émue pour l’autre “sacrifié” sur l’autel de la cruauté gratuite, feu Etienne YAKANOU de l’ANC. Courage à leurs familles. présent, Il appartient à nous autres “survivants” ou citoyens “libres” en sursis, de nous battre pour que justice soit rendue pour le repos de l’âme militante de ces lâchement assassinés!