Le chef de l’Etat togolais, Faure Gnassingbé, a ouvert, ce mercredi 23 Mars à Lomé, le premier sommet africain sur la cybercriminalité placé sous le thème: « faire de la cybersécurité une priorité absolue pour les États africains ». Dans son discours d’ouverture, Faure Gnassingbé a souligné la nécessité pour les pays africain d’être parties prenantes du nouveau monde en construction autour du numérique, afin de répondre de manière adéquate aux enjeux qu’ils comportent. Le locataire de Lomé II a même reçu le “Prix du Champion d’Afrique de la cybersécurité” à l’ouverture de cette rencontre internationale. Voici le discours du chef de l’Etat dans son intégralité.
Madame le Premier Ministre,
Honorables députés à l’Assemblée Nationale,
Madame la Secrétaire exécutive de la Commission Economique des Nations Unies pour l’Afrique,
Monsieur le Président de la Commission de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest,
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Mesdames et Messieurs les Directeurs Généraux d’Agences nationales en charge de la Cybersécurité,
Mesdames et Messieurs les experts en Cybersécurité,
Distingués invités,
Le Togo se réjouit d’accueillir le premier Sommet sur la cybersécurité en Afrique. Au nom du peuple et du Gouvernement togolais et en mon nom propre, je voudrais vous souhaiter la cordiale bienvenue à Lomé et un agréable séjour au Togo.
Nous sommes réunis ici afin de mener ensemble des réflexions sur les moyens de relever les défis liés à la cybercriminalité. Il s’agit de développer des synergies pour combattre la criminalité dans la transition numérique, une révolution de notre époque qui ouvre des perspectives remarquables à l’humanité.
Aussi, suis-je très sensible à la marque de reconnaissance qui m’est faite ce jour, en me décernant le Prix du Champion d’Afrique de la cybersécurité. Je reçois cette distinction avec beaucoup d’humilité parce qu’il est rare qu’on vous offre un prix avant que vous ne commenciez votre mission. Merci pour la confiance et je vous promets que la mission sera accomplie avec beaucoup de diligence. Cette distinction me conforte dans le choix de mon pays de faire du numérique un vecteur de développement et renforce ma détermination à poursuivre cette œuvre. Je voudrais très amicalement aussi associer tous les ministres des pays frères à ce prix. Je crois que c’est un encouragement pour le continent africain, pout les chefs d’Etat africains à aller dans ce sens.
Distingués invités,
Mesdames et Messieurs,
La question qui nous rassemble aujourd’hui est un des enjeux majeurs de notre temps. En effet, notre monde connaît actuellement une révolution industrielle qui métamorphose complètement nos modes de vie. Ces transformations dont nous n’appréhendons pas encore pleinement les contours, sont d’une portée incommensurable. Cette révolution portée par la transition numérique, plonge l’humanité dans une complexité qui appelle l’ensemble des acteurs à une étroite collaboration. Elle est caractérisée par une fusion des technologies qui entraîne la disparition des frontières entre les sphères physiques, numérique et biologique.
Elle est aussi marquée par sa vitesse et par son impact sur les populations du monde entier et bouleverse les fondements de nos sociétés. Dès lors, nous assistons à la transformation des systèmes entiers de production, de management et même de gouvernance. Aussi, est-il important que l’Afrique soit au rendez-vous et en même temps partie prenante de ce nouveau monde en construction pour répondre de manière adéquate aux enjeux qu’il comporte. Les opportunités offertes par le numérique sont grandes et nous devons en tirer pleinement les profits. Elles permettent d’augmenter nos revenus et d’améliorer la qualité de vie de nos populations.
Par ailleurs, en cette période de pandémie mondiale, nous avons pu constater heureusement comment le déploiement, de façon rapide et efficace, de solutions numériques nous a permis d’être au plus près de nos concitoyens et de les protéger, dans un moment où ils avaient le plus besoin de nous. En effet, depuis plusieurs années déjà, le Togo essaie d’exploiter cette voie du numérique.
L’année 2021 a été un peu tournant comme dans tous les pays. Elle a notamment été marquée par l’ouverture de Lomé Data Center et les premiers jalons posés pour la création de l’Agence Togo Digital pour coordonner les projets numériques du gouvernement. En matière d’infrastructures, notre vision est de contribuer, avec le secteur privé, à déployer de la fibre optique sur tout le territoire togolais et de rendre disponible le très haut-débit aux populations à des prix abordables. Il y a à peine quelques jours, nous avons inauguré l’arrivée d’un nouveau câble sous-marin au Togo faisant ainsi de notre pays le premier point d’atterrissage du câble sous-marin Equiano de Google en Afrique.
Les bénéfices que nous pouvons tirer de ce câble ont été rappelés par Madame le Ministre et la Secrétaire Exécutive de la CEA.
Mesdames et Messieurs,
Ce formidable avenir qu’il nous appartient d’écrire ensemble, nous confronte également à des défis que nous avons l’obligation de relever en commun. L’une des préoccupations majeures de l’Afrique, à cet égard, est la cybersécurité.
Nos Etats doivent ensemble établir des cadres juridiques pour réglementer l’utilisation du cyberespace et réprimer les cybercrimes et activités connexes. Dans cet ordre d’idées, nous devons mettre en œuvre, vous l’avez aussi rappelé Madame la Secrétaire Exécutive, la Convention de l’Union Africaine (UA) sur la cybersécurité et la protection des données à caractère personnel, adoptée à Malabo en Guinée Equatoriale le 27 juin 2014, dont l’objectif est d’assurer la coopération efficace et efficiente des pays africains en matière de cybersécurité, de lutte contre la cybercriminalité et de protection des données à caractère personnel.
Au Togo, le Parlement a adopté le 29 juin 2021 la loi autorisant la ratification de cette Convention en vue de permettre son intégration dans notre législation nationale. La volonté du Gouvernement de faire du numérique un vecteur de croissance et de développement du pays comporte le risque aussi de voir les activités criminelles s’intensifier en ligne. Les tenants de ces activités criminelles bénéficient de la rapidité, de la simplicité et de l’efficacité de la digitalisation, ce qui facilite la croissance exponentielle de leurs actes.
En outre, la ratification de la Convention de Malabo qui fait du Togo seulement le 11ème pays ayant déposé les instruments de ratification de ce Texte, lui permettra de bénéficier de la coopération avec d’autres Etats de l’Union Africaine en ce qui concerne la protection des données à caractère personnel et étatique. Cette ratification vient couronner les efforts consentis par le Gouvernement pour la protection du cyberespace togolais par la mise à jour de son cadre législatif. D’ores et déjà, pour protéger son cyberespace, le Gouvernement togolais a mis en place des Institutions telles que l’Agence Nationale de la Cybersécurité (ANCy) et la société Cyber Défense Africa (CDA).
Ces structures assurent la cybersécurité pour les programmes de transformation digitale du pays qui, entre autres, prévoient la numérisation complète de 75 % des services publics et sociaux ainsi que la couverture de 100 % de la population éligible par un nouveau système national d’identification biométrique d’ici 2025.
Etant donné que les actions cybercriminelles sont transfrontières, un tel paramètre rend plus complexe la lutte contre la cybercriminalité. C’est pourquoi, il est nécessaire d’agir ensemble, non seulement entre Etats mais avec tous les acteurs de l’écosystème numérique.
Dans cette optique, l’Union Africaine, dépositaire de la Convention de Malabo, doit jouer un rôle prépondérant dans la réalisation des objectifs de cet instrument juridique. A cet égard, notre Organisation continentale doit inciter, moi avec le nouveau prix en tête, les Etats membres à ratifier cette Convention. Il est aussi important que les Organismes du système des Nations Unies apportent l’assistance technique nécessaire à nos Etats dans la mise en œuvre de ladite Convention.
Distingués invités, Mesdames et Messieurs,
Au cours de l’histoire, les grandes révolutions technologiques ont fondamentalement modifié les dynamiques de l’activité humaine en transformant les sociétés elles-mêmes de façon globale. Les mutations en cours auront elles aussi certainement de profondes répercussions. Mais comment faire face aux effets néfastes desdites mutations ?
Voilà une question qui fait l’objet de nombreux débats, tant au niveau des pays qu’à l’échelle internationale, surtout en cette période où les tensions géopolitiques s’accentuent et révèlent, de façon poignante, la menace d’une “grande fracture numérique” entre les grandes puissances mondiales et les pays en développement, singulièrement l’Afrique. Seule la coopération numérique entre les Etats, dans un cyberespace où règneraient les principes universels relatifs à la paix et à la sécurité, à l’équité, aux droits humains et 7 au développement durable, apparaît de plus en plus comme la condition essentielle pour tirer à la fois le meilleur profit de la révolution numérique en marche et mobiliser, en même temps, toutes les énergies et toutes les ressources nécessaires pour endiguer durablement la cybercriminalité sous toutes ses formes et manifestations.
Le présent Sommet de Lomé, premier du genre en la matière sur notre continent africain, a la lourde obligation d’apporter des réponses idoines à ce double enjeu et de tracer la voie à suivre. Dès lors, il prendra tout son sens et sera d’une utilité certaine. Je vous souhaite des débats fructueux pour faire de la cybersécurité une priorité absolue pour nos Etats.
Je déclare ouvert le premier Sommet sur la cybersécurité.
Je vous remercie.