Faure Gnassingbé était invité le 12 octobre dernier à Washington, dans le cadre d’un séminaire de haut niveau sur l’accélération de la transformation digitale en Afrique de l’Ouest. « Ce 12.10.2022 au siège de @WorldBank, j’ai été heureux de partager notre vision, nos actions et nos ambitions pour le développement du numérique, au cours de la session consacrée à l’identification des priorités pour accélérer une transformation inclusive en Afrique de l’ouest », a tweeté le fils de Gnassingbé Eyadéma qui, comme il arrive lors de ce genre de rencontres, a fait un état des lieux sur les actions entreprises par le Togo pour résolument prendre pied dans la voie du développement. David Malpass, Président du Groupe de la Banque mondiale a de son côté réitéré le soutien de l’institution qu’il dirige, par le biais des engagements et des projets de l’Association internationale de développement (IDA). De « nouveaux engagements destinés à renforcer l’inclusion sociale et la résilience de nos populations dans un contexte économique mondial particulier », s’est réjoui Faure Gnassingbé.
Il a été aussi question de l’adoption d’une stratégie de transformation numérique à l’horizon 2025, de la digitalisation de l’administration ainsi que des services financiers, du lancement d’une solution digitale de solidarité et d’inclusion pendant la pandémie, du déploiement systématique de la fibre sur le territoire. Faure Gnassingbé en a mis plein les oreilles à un auditoire trié sur le volet. Mais a-t-il pour autant séduit ? À moins que son auditoire ne soit un ravi de la crèche, on se demande qui pouvait bien croire au numéro du Président togolais. Sérieusement ?
Le Togo est si bien développé que son Président en est arrivé à partager ses actions et ses « ambitions pour le développement du numérique, au cours de la session consacrée à l’identification des priorités pour accélérer une transformation inclusive en Afrique de l’Ouest » ? Dix-sept années que Faure Gnassingbé est au pouvoir, mais ses équipes successives et lui-même peinent à jouer la carte du développement dans un pays miné par la corruption, la gabegie, la gestion des richesses du pays dans une opacité dantesque, cependant que le peuple est continuellement sur la paille. C’est dans le pays dont Faure partage la vision avec les autres que la santé et l’éducation sont les grands oubliés des projets. C’est dans le pays vanté outre mesure à Washington que les élections sont ad vitam æternam truquées, les opposants bâillonnés, enfin un pays où il ne fait pas bon critiquer le pouvoir séculaire. Ce qui prête tout de même à sourire est qu’aucun développement n’est possible dans un pays en délicatesse avec la liberté d’expression et la démocratie. À ce jour, le Togo figure piteusement parmi les pays réfractaires à l’alternance, avec ce que cela implique en termes d’exilés politiques.
Si Faure a des choses à partager à Washington, ce doit plutôt être son incapacité à quitter le pouvoir par la grande porte, celle à réconcilier les Togolais entre eux, celle à leur pourvoir des soins de qualité et un pouvoir d’achat pas piqué des vers. Mais au lieu de ces chantiers trop lourds pour Faure, le peuple a droit aux programmes et autres feuilles de route gouvernementales mortes-nées qui ne peuvent bluffer que ceux qui ne voient pas plus loin que le bout de leur nez. Parler de croissance économique, de diversification de l’économie, de transferts monétaires sociaux, d’amélioration du climat des affaires, ou encore de la digitalisation dans un canapé est une chose. Mais les mettre en application en est une autre. Et ça, ce n’est pas donné aux Gnassingbé.
Sodoli Koudoagbo
Source: Le Correcteur / lecorrecteur.info