Bola Tinubu n’aura pas perdu de temps. Neuf jours après le dernier sommet de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) qui s’est tenu à Bissau, le nouveau président en exercice de l’organisation, et tout nouveau président du Nigeria, a convoqué les membres de la troïka pour un mini-sommet consacré au suivi du conclave de la semaine dernière.
Le Nigérian avait à ses côtés ses homologues béninois, Patrice Talon, et bissau-guinéen, Umaro Sissoco Embalo, à qui s’est joint le chef de l’Etat nigérien, Mohamed Bazoum.
Lors de cette rencontre de la troïka+1 tenue le mardi 18 juillet dernier à Abuja, les chefs d’Etat ont décidé de « réengager les trois Etats membres, Mali, Burkina et Guinée, au plus haut niveau » et d’envoyer en mission le « numéro un béninois » auprès de ces trois transitions. Une mission au sommet sans pour autant mettre sur la touche les médiateurs Goodluck Jonathan, Mahamoudou Issoufou et Yayi Boni, qui géraient respectivement les transitions malienne, burkinabè et guinéenne.
On se rappelle la dernière conférence des chefs d’Etat de l’organisation sous-régionale où le Nigérian avait eu des mots assez durs contre les changements anticonstitutionnels, promettant de faire en sorte qu’il n’y ait plus de coups d’Etat en Afrique de l’Ouest.
C’est donc dans le droit fil de cette ligne de conduite que Patrice Talon doit se rendre à Bamako, Ouaga et Conakry. Pour le moment, ni la date, ni la durée, encore moins les objectifs de sa mission ne sont connus. Tout au plus sait-on que « la CEDEAO restera attachée à des transitions rapides, à des processus électoraux inclusifs et au respect des chartes des transitions ». Autant dire que l’envoyé spécial de Tinubu aura du grain à moudre, dans la mesure où les trois pays sont engagés dans des transitions pour le moins incertaines.
Certes le Mali a organisé un référendum constitutionnel le 18 juin 2023, mais bien malin qui pourrait dire à cette étape si le délai de février-mars 2024 pour la tenue des élections générales et le retour à une vie constitutionnelle normale seront respectés. Idem pour le Burkina, dont la transition est censée prendre fin en juillet 2024.
Mais à Bamako comme à Ouagadougou, on entend certaines voies plus ou moins officielles conditionner la tenue du scrutin au retour de la sécurité et à la reconquête du territoire.
Concernant la Guinée, après avoir traîné les pieds pendant de longs mois, le colonel Mamady Doumbouya s’est finalement engagé à remettre le pouvoir aux civils en début d’année 2025.
Dans ces trois pays, les transitions avancent à un train de sénateur. Et vu les postures qui sont celles des putschistes, on peut se risquer à dire que le soldat Talon s’embarque dans une mission pour le moins incertaine.
On a bien peur en effet que l’envoyé spécial de Tinubu ne prêche dans un désert où il a peu de chances d’être entendu par des officiers rétifs, particulièrement sourcilleux sur leur souveraineté et dont les partisans rappellent à l’envi que la CEDEAO est souvent absente quand se nouent les crises, qu’elles soient sécuritaires ou liées aux modifications constitutionnelles et qu’on ne la voit que lorsque le mal est déjà fait. Un médecin donc après la mort, comme on l’en accuse régulièrement, et qui serait, de ce fait, très mal placé pour faire des injonctions à des Etats qui se battent pour s’en sortir.
L’observateur Paalga
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