Si Faure Gnassingbé était comme certains de ses ministres, nous serions tous en prison en ce moment

Alors que je suis couché ici et que mon genou me regarde comme si j’étais une personne étrangère, l’actualité nationale m’énerve.

Ainsi donc, Anani Sossou et Loic Lawson, après une nuit de garde à vue et une présentation devant le procureur, vont passer leur première nuit en prison (je viens de l’apprendre), pour avoir publié une information relative au vol d’une somme d’environ 400 millions au domicile d’un ministre. J’avais moi-même repris cette publication en la mettant au conditionnel, car même si la réalité d’un cambriolage était validée par plusieurs sources, je ne connaissais pas le montant. Je crois d’ailleurs que la seule personne qui peut connaître le vrai montant est le prioritaire.

Mais quand je compare donc l’infraction (je reviendrai sur le sujet) à ce que nous autres, politiciens, disons sur les président Faure tous les jours, si ce dernier devrait agir de la même façon, nous serons des milliers à être en prison. Je ne vais pas répéter tout ce que nous écrivons, disons du président tous les jours, mais s’il prenait ça en compte, c’est un Kazaboua de plusieurs kilomètres carrés qu’il faudra construire pour nous abriter. Je considère que lorsqu’un est politicien, on doit avoir le courage de supporter une certaine médisance car elle est inhérente à notre métier.

Mais attention, on peut aussi arguer que l’honneur et la dignité sont des éléments fondamentaux et quand on est diffamé, c’est normal de porter plainte. Mais un homme politique n’agit pas comme une personne lambda. Supposons que j’étais à la place du ministre et que des journalistes inventent entièrement une histoire concernant un vol de 400 millions chez moi. Bon, en vérité, si c’est moi, je fais juste une conférence de presse pour démentir et l’affaire est close. Et puis moi qui sais très bien parler là, à la fin de la conférence, c’est les journalistes qu’on va bien insulter même. C’est ainsi que les politiciens règlent leur compte. Et c’est élégant.

Mais supposons que je veuille aller à la justice. Je porte plainte, ils sont écoutés et ils sont laissés en liberté jusqu’au procès. Comme je ne cesse de le dire, il y’a eu plusieurs scandales économiques dans ce pays dont les responsables n’ont jamais été inquiétés, ne serait-ce que par une audition. La détention préventive devrait être réservée à des criminels, tant de droit commun qu’économiques. Si au procès, ils reconnaissent qu’ils ont publié de fausses informations, en ce moment, on peut leur appliquer les rigueurs de la loi. Mais si au procès s’il advenait, comme il m’a été rapporté, que le cambriolage a effectivement eu lieu et que ce sont les sommes qui sont surévaluées, je crois que vous serez comme moi, curieux de savoir quels sont les vrais montants, et si la valeur de ces montants est-elle éthiquement acceptable. Attention, mon propos ici vise l’exemplarité. Je n’ai pas les chiffres exact mais dans l’Uemoa, il y’a un seuil à ne pas dépasser en argent domestique, peu importe l’origine de cet argent. Il faut bien entendu éviter de donner l’impression que l’argent qui aurait été cambriolé n’aurait pas d’origine légale. Là n’est pas le sujet.

Ce qui me choque aujourd’hui, c’est qu’il soit admis qu’il y a eu cambriolage et que des journalistes soient en garde à vue pour en avoir parlé, même si les sommes sont surfaites.

Ce qui me choque c’est qye le nom du pays soit encore épinglé dans cette affaire, pour finir comme un pays prédateur de la liberté de presse alors qu’on aurait pu procéder autrement.

Je ne suis pas opposé à un procès. Si les journalistes ont menti au sujet de ce vol, qu’ils soient punis à l’issue d’un procès équitable où il faudrait qu’ils produisent les éléments de preuve, mais la prison comme de grands bandits, pour moi ça ça va trop loin.

Que pensez-vous de cette garde à vue ? Vos avis m’intéressent.

Bref, je suis ici avec ma jambe calée et je parle. Quand ça va tomber sur Abass Kaboua et moi ici, c’est dans civière on va venir me prendre et déposer à la gendarmerie là-bas. Nous deux avec nos bouches là !

Pour conclure, je vais m’adresser au ministre. Cette affaire-là n’arrange personne. Les deux journalistes sont tes petits frères. S’ils ont menti sur ton compte, demande qu’ils fassent un démenti et founoufa. Plus on continue, plus les gens qui n’étaient pas au courant de l’histoire le seront. Les médias internationaux, (surtout Rfi) vont récupérer l’affaire là pour gâter notre nom partout cadeau. Mangeons le singe sale en famille. La vengeance détruit là où le pardon glorifie.

Pardonnons-nous nos offenses, comme le Seigneur nous a pardonnés. Vivants.

Gerry  Taama