Le 6 décembre 2023, l’Assemblée Nationale a procédé au lancement de l’étude du budget de l’État exercice 2024 adopté par le gouvernement le 23 novembre dernier. Il faut préciser que conformément aux dispositions pertinentes de la Loi Organique portant Loi des Finances(LOLF), le gouvernement est tenu de déposer dans un délai raisonnable, la loi des finances accompagnée d’une documentation et d’autres informations budgétaires pour permettre aux membres de l’Assemblée Nationale et bien d’autres personnes intéressées par la gestion des finances publiques dans son ensemble, de se faire une idée de la trajectoire du budget programmé.
Doit-on le rappeler, le Togo a adopté la LOLF en 2014 mais son application effectivement date de 2021.
Cette année encore, le gouvernement s’est exécuté face à cette responsabilité républicaine. Mais force est de constater c’est avec beaucoup de retard considérable que cela a été fait. Ce qui laisse entrevoir l’inefficacité de l’étude de ce budget en commission qui risque de passer comme une ordonnance médicale, vu le nombre de documents et leur volume à éplucher et comprendre avant de voter. Ce qui peut mettre en doute le principe du contrôle en amont de l’action du gouvernement par le parlement.
L’analyse de l’exposé des motifs renseigne que la résilience de l’économie face à plusieurs contraintes nées de l’avènement de la Covid-19, la guerre en Ukraine et les sanctions prises contre certains pays de la sous-région par la CEDEAO est effective. Cependant, des incertitudes existent sur les échanges économiques au sein de la communauté. Certes l’économie nationale est toujours dans contexte de conjoncture défavorable avec une pression inflationniste avec des conséquences imprévisible. Néanmoins, l’on note un regain de dynamisme avec un taux de croissance prévisionnel de 6,6% en 2024 contre 5,8 en 2023.
Sur le plan de la mobilisation des ressources de l’Etat, les ressources fiscales connaissent une progression remarquable depuis quelques années avec des performances appréciables de l’OTR de même que les ressources non fiscales.
En effet, plusieurs mesures sont prévues entre autres, la suppression du taux de réduction appliquée au secteur de l’hôtellerie et les jeux de hasard à la charge du parieur de même que l’augmentation du taux des droits d’assises sur les boissons alcoolisées. On note également l’élargissement de l’assiette fiscale avec de nouveaux produits ainsi que la taxe foncière sur les propriétés bâtis de maisons d’habitation ainsi que le taux de la patente pour les voitures d’occasions et une taxation spéciale pour les produits de tabac.
Aussi la taxe sur les activités financières couvrent-elles désormais les opérations de transfert d’argent par la téléphonie mobile.
La mise œuvre de toutes ces mesures permettra de porter le niveau des recettes fiscales à 1042,1 milliards de FCFA soit une augmentation de 14% par rapport à 2023.
P our ce qui concerne les ressources non fiscales, on ne dispose pas pour le moment des détails concernant les recouvrements. Cependant, un plan de supervision et de contrôle des régies des recettes de l’État sera mis en œuvre pour améliorer les recettes. En tout état de cause, les recettes non fiscales sont prévues pour un montant de 62 milliards de FCFA en 2024 soit 3,2% de plus par rapport à 2023. Ce qui amène à interpeller les députés à bien fouiner dans ses données qui concernent les prévisions des dividendes de l’État en ce qui concerne les parts de l’État dans les entreprises extractives et aussi la contribution des sociétés d’État dans le budget.
Globalement, il importe de saluer les performances affichées ces dernières années par le ministère de l’Economie et des Finances et en particulier l’OTR pour tous les efforts et les résultats obtenus.
Au titre de l’année 2024, le besoin en trésorerie se chiffre à 882,8 milliards de FCFA contre 767 milliards en 2023, soit une augmentation de 15%. Ce qui pose la vraie problématique de la politique budgétaire adoptée par le gouvernement togolais. Avec 40% des recettes constituées par un apport extérieur, y compris les dons et les dons projets qui parfois sont pris en compte dans le budget alors même que le processus d’accord avec les bailleurs de fonds n’est pas encore à terme. Cette posture relève du snobisme et cela jusqu’ à quand ? D’où l’incohérence et le manque de sincérité des prévisions budgétaires devenus monnaie courante.
Pour ce qui concerne les prévisions des dépenses, il serait difficile à l’étape actuelle des choses d’avoir les détails.
En tout état de cause, l’exposé des motifs enseigne que 669,2 milliards sont consacrés à renforcer le bien-être de la population, soit 48% de crédits budgétaires. Cependant, il est à noter que l’utilisation et la gestion de ces Fonds ont toujours posé l’éternel problème de bonne gouvernance en ce sens que la plupart des responsables de ces programmes se comportent comme des criquets pèlerins, prêts à se servir qu’à servir l’intérêt général.
Aussi on note que 112 milliards de FCFA seront consacrés au secteur de la santé soit 8,1% de crédits budgétaires très loin de 15% du budget préconisé par le sommet des chefs d’Etat d’ Abuja.
Pour les travaux publics, un montant de 85,8 milliards est prévu soit 6,1%, les transport sont à 18 milliards soit 1,3%, les pistes rurales pour un montant de 53,7 milliards soit 3,8%, l’économie maritime et la pêche pour 3,2 milliards de FCFA soit 0,2%.
Pour ce qui concerne l’agriculture considérée comme la base de l’économie d’après les résolutions des FOPAT 2023, la prévision budgétaire est de 52,1 milliards soit 3,7% des crédits, l’économie numérique pour 14,4 milliards de FCFA, le secteur commercial bénéficie de 3,6% soit 50,5 milliards de FCFA pour la construction des grands marchés alors que le secteur du développement à la base disposera de 19,5 milliards de FCFA.
Pour le secteur de l’Enseignement Primaire, Secondaire et Technique, les prévisions sont évaluées à 296 milliards soit 14% des crédits budgétaires. Il faut noter que depuis quelques années, ce département ministériel a montré son efficacité tout comme l’enseignement supérieur qui bénéficie d’une prévention de 42,5 milliards.
Pour des raisons que tout le monde connaît, le secteur de la défense disposera d’un montant de 147,5milliards soit 10% des crédits budgétaire pour 2024.
Ainsi, l’on peut se faire une idée des allocations budgétaires des plus importants des départements ministériels.
Les dépenses budgétaires pour le compte de l’année 2024 sont estimées à 1.623 milliards soit une augmentation de 3,2 % en plus de 35,1 % du budget destinés aux charges de trésorerie pour le service de la dette qui passe de 398 milliards de FCFA à 538 milliards de FCFA en 2024.
Ainsi le ratio Service de la dette /recettes internes qui normalement doit être inférieur à 15% est pour le compte du budget de l’État exercice 2024 de 538,6/1042,1 soit 50,1%. Ce qui traduit ni plus ni moins l’effet snobisme dont n mentionné plus haut .
On se rend à l’évidence que tous les efforts de remobilisation des ressources du ministre de l’Economie et des Finances sont annihilés par la gabegie qui caractérise la gestion des finances publiques. Ce qui oblige à revoir tout le système d’allocation et de gestion des ressources publiques. Tout est à revoir si l’on veut préserver l’avenir des générations futures.
La Rédaction