Une cinquantaine de morts et plus de trois cents (300) blessés. C’est le bilan provisoire du drame qu’a vécu le peuple tchadien le 20 octobre dernier, alors qu’il manifestait contre la prolongation de Mahamat Idriss Deby Itno à la tête du pays.
Pendant que tous les observateurs et acteurs des droits humains haussent le ton et dénoncent la répression barbare des forces de l’ordre du fils Deby contre des manifestants sans défense, le Premier ministre tchadien Saleh Kebzabo, lui, promet des représailles, des « poursuites judiciaires » contre des manifestants et leaders politiques qui, selon lui, seraient les instigateurs de cette « insurrection » populaire du 20 octobre 2022.
« Quelle crédibilité aurait donc une justice qui sévirait contre ceux qui s’opposent à la prolongation d’une transition manifestement viciée, mais ferait silence sur l’autorité qui a ordonné à des soldats d’ouvrir le feu sur leurs concitoyens ? », se demande l’éditorialiste Jean-Baptiste Placca. Surtout qu’on ne peut tirer à balles réelles que si l’on en a reçu l’ordre.
Pour le confrère, la situation n’augure rien de très rassurante : « Hélas, avec le père, Idriss Deby Itno, les Tchadiens pensaient avoir bu le calice jusqu’à la lie tant il était capable de fermeté, sinon de brutalité contre tous ceux qui défiaient son pouvoir. Ce peuple doit à présent réaliser que le cauchemar continue. Un tel bilan de morts et de blessés en une seule journée est une bien glaçante prouesse, d’autant plus inquiétante que le Premier ministre n’y a vu qu’une insurrection. Lui qui était, naguère, à la place des opposants qu’il menace aujourd’hui des pires représailles, sous prétexte qu’ils ont appelé à manifester contre ce qui leur paraît injuste ».
Selon l’éditorialiste, tous ceux qui ont, de fait, conféré à ce pouvoir un semblant de légitimité, en pariant sur la bonne foi et la sincérité du fils Deby pour changer de méthode, doivent se raviser. « Ils doivent, à présent, déterminer clairement s’il est prudent et juste, de leur part, de laisser le peuple tchadien en tête-à-tête avec un pouvoir capable d’une telle violence contre des civils. Avec le discours que l’on entend dans le camp aux affaires à Ndjamena, il convient de ne pas minimiser le risque que, demain, l’on apprenne la disparition de certains leaders. Qui a oublié l’universitaire Ibni Oumar Mahamat Saleh ? », prévient Jean-Baptiste Placca.